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Pour la série « Mouches », de Francis Jolly

Katmandou, février 2016 – Doha, mars 2016

 

c’est le corps confisqué
les cellules à distance

c’est le pays natal
absent
défait
fictif

c’est le corps confisqué
sans échappatoire

confisqué pour la dette
abrogé pour la dot
aboli par le groupe
démoli pour la brique
les piliers de béton
et la télévision
et la motocyclette

pour le beau téléphone
rarement pour l’école
et le beau téléphone
et c’est bientôt le temps
revenu
de fêter les divinités

c’est le corps confisqué
le corps démantelé

indexé à l’emprunt à soixante pour-cent l’an
garanti par le champ

le voisin dans la tête
le voisin dans la nuit
dans la respiration
prendre grand soin de lui
de sa pensée de nous

c’est le corps confisqué
les artères en tension
chargées

et pas une ne sait où sont passés les leurs

et de là-bas toujours
coule
la coulée de douleur
c’est à se demander comment il n’y en a pas jusque dans notre pain

 

 


Photographie : Francis Jolly, série « Les Mouches »


Texte paru dans Nous voulons voyager, un livre numérique de Francis Jolly, éditions Tribew, avril 2016, en préambule à une lecture personnelle de sa série Les Mouches.